AUTOMOBILE - Recherche

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À la naissance de l’automobile, la conception des voitures laissait à l’empirisme et à l’imagination des premiers créateurs une liberté sans borne. De nos jours, des contraintes de plus en plus importantes, limitant les possibilités d’expression et la créativité des concepteurs, ne permettent plus un libre choix de solutions techniques. La nécessité d’améliorer en permanence la qualité conduit les industriels à introduire dans leurs produits des technologies nouvelles qui dérivent essentiellement de travaux de recherche à caractères fondamentaux.

Pour préparer la voiture de demain, les grands constructeurs mondiaux se sont dotés de structures, placées en amont des bureaux d’études, chargées de rechercher et de développer des principes physiques et des technologies nouvelles afin de les rendre applicables à l’automobile de tous les jours. Les résultats de ces travaux sont perceptibles au travers des améliorations continues qui apparaissent chaque année sur les voitures (par exemple les freins à disques ou l’ensemble des applications de l’électronique).

Les trois grands axes de recherche de l’industrie automobile en cette fin de XXe siècle sont encore les économies d’énergie, la protection de l’environnement (bruit et pollution) et l’amélioration de la sécurité. En plus d’une veille technologique permanente qui alimente en continu les axes de recherche centrés sur des objectifs précis et dans des domaines scientifiques fondamentaux, certains constructeurs ont lancé de grands programmes de recherche thématiques pluriannuels, aidés ou non par les pouvoirs publics. Cette méthodologie performante mais coûteuse est bien illustrée par le programme «3 litres» orienté vers les économies d’énergie, initié en 1981 après les deux chocs pétroliers de 1974 et 1979. Ce programme est l’exemple d’une action assurant le développement de recherches multiples à partir d’un objectif unique et précis.

1. L’exemple du programme de recherche «3 l /100»

L’objectif prioritaire poursuivi par les constructeurs français et les pouvoirs publics était de réduire de façon très importante la consommation d’un véhicule automobile (réduction visée de plus de 50 p. 100). Le choix de la valeur de 3 litres pour 100 kilomètres parcourus (représentant la moyenne arithmétique des trois consommations normalisées à 90 km/h et 120 km/h stabilisées, ainsi qu’en cycle urbain) constituait un objectif très ambitieux.

Un tel programme représentait une opportunité exceptionnelle de développer des recherches dans de nombreux domaines. De même, le cahier des charges (tabl. 1), très éloigné des programmes industriels à court terme, laissait aux chercheurs une liberté dans l’innovation, qu’il convenait d’exploiter au mieux.

C’est vraisemblablement une des premières fois que l’utilisation de la modélisation mathématique fut étendue à l’ensemble des composants d’un projet. En effet, la généralisation du calcul numérique à toute la voiture a permis d’analyser finement l’ensemble des paramètres d’influence dans tous les domaines (performances, consommation, tenue de route, rigidité, résistance, etc.) et de les ajuster au mieux en fonction du résultat recherché.

Le cahier des charges

L’établissement des données théoriques aptes à déterminer les caractéristiques générales d’un véhicule à faible consommation doit être maintenu dans des contraintes sévères.

Le choix fait d’un véhicule bas de gamme a conduit à des caractéristiques situées dans une fourchette très étroite. En plus des principales données chiffrées du tableau 1, les contraintes suivantes furent rappelées dans le cahier des charges du véhicule:

– habitabilité satisfaisante pour quatre personnes et leurs bagages avec un confort équivalant à celui d’un véhicule de la gamme considérée;

– qualités routières convenables (suspension, tenue de route, freinage, direction);

– performances compatibles avec l’agrément de conduite et l’insertion du véhicule dans le trafic urbain ou autoroutier;

– esthétique acceptable;

– respect des réglementations en vigueur (sécurité, pollution, freinage, etc.).

Les axes de recherche

Les calculs effectués à partir des modèles numériques de véhicules laissent apparaître les paramètres les plus sensibles dans la maîtrise de la consommation en carburant. Ils montrent également que seule une action indissociable et concertée dans trois domaines précis peut conduire au succès. Ce sont: la réduction des résistances diverses à l’avancement; la réduction des masses; l’optimisation de la motorisation.

La connaissance globale préalable du bilan énergétique d’un véhicule léger, évoluant dans les conditions de roulage contractuelles (fig. 1), nous éclaire sur la faiblesse du rendement d’utilisation; on note que seulement 25 p. 100 de l’énergie contenue dans le réservoir de carburant est transformée en énergie mécanique utilisable en extrémité du vilebrequin.

La répartition entre l’énergie utilisable et l’énergie perdue est illustrée par la figure 1, qui montre également la distribution entre les différentes résistances au mouvement (forces aérodynamiques, de roulement, frottements mécaniques de transmission) et les forces d’inertie.

La fraction la plus importante d’énergie est dissipée, dans les moteurs à combustion interne, sous forme de chaleur dans l’eau de refroidissement du moteur et dans les gaz d’échappement (de 60 à 70 p. 100). Dans certains cas d’utilisation, en cycle urbain par exemple, où le moteur fonctionne à faible charge, les pertes peuvent atteindre jusqu’à 93 p. 100 environ.

Les résistances à l’avancement

Le développement des actions de recherche fut centré sur les résistances aérodynamiques, la résistance au roulement et le frottement mécanique.

Les résistances aérodynamiques

Elles représentent la partie la plus importante des résistances à l’avancement d’un véhicule automobile, notamment à vitesses élevées, où elles peuvent atteindre 75 p. 100 de la résistance totale à 120 km/h.

L’expression de la puissance nécessaire pour équilibrer Pa = (1/2) 福SCx V3 montre la prépondérance du facteur vitesse. L’importance des moyens de recherche (théoriques mais surtout expérimentaux) dans ce domaine a conduit à environ 1 500 heures d’essais en soufflerie sur maquettes.

Trois domaines de recherche ont été explorés: une recherche fondamentale sur les formes, tenant compte de deux impératifs, l’habitabilité mais également le style général; une recherche sur la conception et la réalisation de la carrosserie, privilégiant une bonne continuité des surfaces et minimisant les désaffleurements; une recherche sur les circulations internes et les équipements rapportés.

Les recherches sur les formes : ces travaux, à caractère plutôt expérimental, se sont traduits par la réalisation d’une cinquantaine de maquettes à l’échelle 1: 4, essayées successivement en soufflerie.

La relation Pa exprimée plus haut laisse apparaître l’influence du paramètre S (projection frontale). L’intégration des contraintes d’habitabilité a pu conduire à une réduction théorique sensible de S jusqu’à 1,43 m2 bien que l’habitacle d’un véhicule automobile, qui constitue la partie utile, soit également la moins compressible. En fait, une valeur de 1,63 m2 a été retenue comme la plus convenable car se rapprochant davantage des véhicules traditionnels.

À projection frontale constante, les mesures en soufflerie ont montré l’importance de la longueur du véhicule sur la valeur de la traînée aérodynamique, Cx (fig. 2).

La circulation sur route s’effectue généralement en présence de conditions aérologiques variables, en particulier de vent naturel qui s’ajoute vectoriellement à la vitesse propre du véhicule. Des troubles aérodynamiques graves peuvent alors survenir, en accroissant la résistance à l’avancement et en modifiant le comportement routier du véhicule (dans la réponse à une rafale de vent latéral par exemple).

Un bon compromis entre la forme de carrosserie et ces différentes contraintes ne peut être obtenu qu’après de nombreux tests en soufflerie, couplés à des simulations de comportement dynamique sur un modèle numérique de véhicule utilisant des ordinateurs de grande puissance (Cray One).

Les recherches sur l’amélioration de la continuité des surfaces : pour conserver au corps fuselé issu des recherches de forme ses caractéristiques primitives, il a été nécessaire de mettre en œuvre des études sur de nouveaux concepts et de nouvelles technologies en matière de carrosserie, qui permettent d’obtenir des qualités d’affleurement et de jeu compatibles avec une bonne aérodynamique externe (glace affleurante, aménagement des volumes de passage de roues, carénages d’organes mécaniques, etc.).

Les recherches sur les circulations internes et les équipements rapportés : les travaux de recherche engagés ont permis de réduire très fortement la traînée de refroidissement à moins de 3 p. 100 de la traînée totale du véhicule (Cx dû au refroidissement = 0,06).

Un concept de circuit d’air totalement contrôlé, dont le débit est régulé au moyen de volets asservis de façon à maintenir les différentes températures (eau, air, bloc moteur) à des valeurs convenues, a permis d’obtenir ce résultat. Par comparaison, les valeurs de traînée de refroidissement relevées sur des véhicules de série des années 1980 étaient comprises entre 7 et 12 p. 100 de la résistance aérodynamique totale.

En ce qui concerne la correction d’assiette longitudinale, la charge utile (passagers + bagages) d’un petit véhicule, soit 320 kg, représente environ 65 p. 100 de la masse à vide du cahier des charges. Une suspension mécanique à ressorts et à grand débattement introduit de fortes variations d’assiette longitudinale et de garde au sol avec la charge. Par voie de conséquence, la résistance aérodynamique subit des variations importantes (fig. 3).

Pour corriger cette tendance et maintenir la traînée à sa valeur optimale, il convient de maintenir constantes les hauteurs avant et arrière de la carrosserie. À cette fin, les véhicules furent équipés de suspensions mécanique et hydropneumatique, à correction de hauteurs automatiques, qui ont pour mission d’assurer une attitude du véhicule aussi proche possible de la valeur optimisée en soufflerie. Le pilotage de ces automatismes est confié à un microprocesseur qui gère électroniquement la position en hauteur de chaque essieu.

À titre d’exemple, une variation de 55 mm de hauteur à l’arrière de la carrosserie se traduit par 5 p. 100 de variation de traînée et conduit, à 120 km/h, à un accroissement de consommation de 3 p. 100.

Le résultat des recherches sur l’intégration des équipements (rétroviseurs, essuie-glaces, etc.) a permis de ramener la résistance aérodynamique de cette série de véhicule à une valeur de Cx = 0,21, ce qui est une très bonne performance pour un véhicule de cette taille.

Résistance au roulement de pneumatique . La résistance à l’avancement d’un pneumatique roulant sur le sol s’exprime en général sous la forme d’un rapport entre la force de traînée en direction du déplacement, et la charge verticale, soit Fx /Fz en kilogrammes par tonne. En 1980, cette valeur était en moyenne de 14 à 16 kg/t. Grâce aux recherches menées par les manufacturiers (en particulier par la société Michelin) sur la forme de la bande de roulement ou les types de gomme, une valeur de 8 à 9 kg/t a pu être obtenue en respectant la sécurité et la longévité du pneumatique.

Les frottements d’origine mécanique . La recherche des réductions de frottements parasites entre les différentes pièces mécaniques en mouvement a également constitué un axe de travail motivant. Deux exemples sont significatifs à cet égard: les joints d’étanchéité des roulements de roues avant consommaient 1,4 p. 100 de la puissance totale du véhicule à 120 km/h et les frottements résiduels des garnitures de freins à disques représentaient 3,6 p. 100 de la puissance à cette même vitesse. Des réductions de 20 à 35 p. 100 ont pu être obtenues sur ces pertes énergétiques.

Action sur la réduction des masses

Depuis de nombreuses années, les constructeurs s’attachent à réduire la masse des véhicules en réduisant les forces d’inertie ou de gravité (par exemple les forces dues aux accélérations au cours du cycle urbain ou de gravité lors du franchissement d’une pente), et les forces de traînée du pneumatique.

Le véhicule 3 litres est un véhicule très léger, il pèse 450 kg environ, alors qu’un véhicule conventionnel correspondant pèserait 700 kg. La réduction de masse résulte d’actions sur la nature des matériaux mais également du dessin de la structure, des organes mécaniques et des équipements.

Cet allégement entraîne une réduction des efforts en service, conduisant à une réduction du dimensionnement des différents organes et, par voie de conséquence, permet une diminution du niveau de motorisation.

L’allégement des structures de carrosserie

Cet objectif a été tenu en réalisant un nouveau concept de structure mixant pièces métalliques et matériaux de synthèse. La réduction de poids obtenue atteint 20 p. 100 par rapport à une structure classique. L’évolution du facteur P/S en kilogrammes par mètre carré (poids de structure sur la surface projetée au sol), entre 1980 et 1990, fait apparaître la discontinuité correspondant au saut technologique du programme (fig. 4).

Ces résultats ont été obtenus par des actions conjointes s’appuyant, d’une part, sur une réduction du nombre de pièces (l’application de ce concept a permis de passer de 288 pièces sur un véhicule de série, par exemple, à 85 sur le prototype no 3 du programme) et, d’autre part, sur l’optimisation du choix des matériaux en fonction de leurs caractéristiques mécaniques. Dans ce cas, il a été fait appel à un calcul de modélisation par une méthode «éléments finis» pour assurer une distribution équilibrée des efforts dans toute la structure.

Toutefois, il faut noter que la tendance indiquée par ces courbes ne reflète pas les prévisions réalisées en vue de l’étude des véhicules futurs. En effet, l’accroissement considérable du nombre d’équipements divers (4 roues motrices, ABS, etc.), la sévérité accrue de certaines normes de sécurité ont pour conséquence d’inverser le sens de variation (un effet cumulatif inverse se manifeste, c’est-à-dire l’accroissement de la masse d’équipement entraîne celle de la structure qui doit la supporter). Cependant, dans le cadre du programme de recherche développé, les efforts d’allégement réalisés sur les organes mécaniques du véhicule 3 litres, ont conduit à des réductions importantes de masse (tabl. 2).

Transmission

La transmission est l’organe fondamental destiné à adapter à tout moment la charge résistante aux conditions de fonctionnement du moteur. La transmission à variation continue, aussi séduisante soit-elle car elle permet un ajustement continu de la fonction, présente, dans le cas du véhicule économique, des inconvénients non négligeables. En effet, son rendement énergétique n’est pas optimal pour des plages d’utilisation élevées (de 6 à 7), le dispositif de régulation est un consommateur d’énergie (en régime stabilisé, et lors des périodes de régulation), de plus, l’adaptation du moteur sur la courbe d’utilisation dictée par la régulation reste difficile.

Le choix s’est donc porté sur une boîte mécanique à cinq rapports, associés à un moteur étudié pour obtenir de faibles consommations aux charges partielles et à un couple important aux régimes moyens afin de sauvegarder l’agrément de conduite.

Les moteurs

En raison de la courte durée du programme (5 ans) et de la faible puissance nécessaire pour satisfaire au cahier des charges (12 kW, tabl. 3), seul le moteur classique à combustion interne pouvait constituer une solution industrielle à moyen terme.

Le développement de moteurs à 3 cylindres, 4 temps (essence et diesel) est apparu comme la solution industriellement la plus cohérente. D’autres recherches engagées sur des voies différentes (2 temps, cycle de Rankine, etc.) étaient destinées à être poursuivies au-delà de la fin du programme et constituaient des travaux dont l’aboutissement ne pouvait être envisagé qu’à très long terme.

Réduction des consommations et allégement des moteurs

Deux voies de recherche ont été explorées dans le but de réduire les consommations: travail sur l’architecture du moteur (par une adaptation de la cylindrée et du rapport volumétrique de ce dernier afin d’obtenir un bon rendement thermodynamique compte tenu du carburant utilisé, un dessin adapté aux charges demandées de manière à réduire les forces d’inertie et les frottements, une réduction des pertes thermiques) et recherche de solutions adaptées concernant les diagrammes de distribution (un régime de ralenti autorisant une consommation minimale en cycle urbain, une alimentation assurant une bonne préparation du mélange carburé).

En matière d’allégement des moteurs, des réductions de masse importantes ont été obtenues: gain de 32 p. 100 environ.

Performance des moteurs

Le moteur à essence de 3 cylindres réalisé dans le cadre de ce programme fait apparaître une économie de carburant de l’ordre de 15 à 18 p. 100 sur toute la gamme de vitesses stabilisées (fig. 5).

Une version diesel à injection directe (avec et sans suralimentation) a également été développée.

Des étapes prototypes du programme Éco 2000 de P.S.A. (Peugeot société anonyme)

Les différentes phases du programme 3 litres P.S.A. ont été marquées par des réalisations de prototypes chargées de matérialiser chaque étape et le résultat des recherches à un moment donné puis de faire le point par rapport à l’objectif. Les différents véhicules expérimentaux figurent avec leurs caractéristiques principales dans le tableau 4.

Autres recherches développées sur ce thème en France et dans le monde

Les conditions économiques résultant des chocs pétroliers des années 1970 ont amené tous les constructeurs à considérer les économies d’énergie comme une préoccupation essentielle.

En France, des programmes moins ambitieux que le programme 3 litres avaient fait naître, au cours des années 1970, les programmes Ève pour Renault et Véra pour Peugeot. De même, en 1986, Renault a obtenu des résultats identiques à Éco 2000 avec son véhicule Vesta.

En Europe et dans le monde, seule l’Italie s’est attaquée aux problèmes du véhicule bas de gamme avec son projet X75 de la société Fiat (1985), qui est très proche des objectifs du programme 3 litres.

L’Allemagne, avec les véhicules de recherche de Volkswagen VW 2000, de Mercedes Unicar, d’Opel tech. 1, la Grande-Bretagne avec British Leyland et son prototype ECV 3, la Suède avec Volvo, dont le véhicule L.C.P. avait pour objectif 4 litres aux 100 kilomètres, ont aussi recherché une réduction de la consommation.

Aux États-Unis, les efforts de Ford ont porté sur les véhicules de recherche de la série Probe I à IV (le Cx de la Probe IV était remarquablement bas: 0,15). La General Motors, avec sa voiture expérimentale Aero X et Aero 2000 puis la Citation IV de Chevrolet, visait des objectifs analogues.

Enfin, au Japon, on peut noter les efforts réalisés dans cette même voie par les constructeurs Toyota avec le véhicule AXV ou Nissan NX 21.

2. Perspectives pour un véhicule du futur

L’industrie automobile, bien que centenaire, doit-elle être considérée comme une industrie du futur? Les recherches entreprises dans de nombreuses sociétés ont révélé le potentiel extraordinaire que représentent les découvertes réalisées dans le domaine fondamental.

L’accoutumance aidant, le conducteur automobile considère aujourd’hui comme naturelles des performances qui auraient paru tout à fait extraordinaires il y a seulement vingt-cinq ans, c’est-à-dire dans un passé très proche.

Le champ immense de l’innovation qui se développe dans les centres de recherche des constructeurs, mais également dans d’autres laboratoires privés ou publics, conduira dans le futur à une évolution que les spécialistes de la prospective peuvent déjà distinguer à travers le bouillonnement des idées nouvelles.

De l’aérodynamique, activée par les crises énergétiques, aux recherches d’applications de la micro-électronique, tous les domaines de la science participeront à l’avènement du nouveau concept automobile. Le développement des automatismes et de l’intelligence artificielle apportera au conducteur de cette fin du XXe siècle la part peut-être la plus sensible des changements dans l’environnement de son confort de conduite.

Tout comme les progrès que l’on a tendance à oublier et qui ont conduit le véhicule d’aujourd’hui à se comporter comme un objet obéissant aux ordres du pilote, les technologies des nouveaux organes de liaison sol, de transmission à adhérence contrôlée contribueront à rendre encore plus sûr le produit automobile.

De même, la sécurité et la fiabilité des systèmes de propulsion seront améliorées, du bon vieux moteur alternatif à allumage commandé aux nouveaux systèmes transformateurs d’énergie.

Enfin, de nouveaux matériaux obtenus par synthèse continueront à prendre possession de la voiture, en apportant, sur le plan de la flexibilité du style et de la lutte contre la corrosion, des avantages incontestables.

L’enrichissement du produit automobile s’est effectué de façon continue dans le passé, mais les pressions combinées de nombreux facteurs accélèrent aujourd’hui cette tendance. On peut citer: l’amélioration de la qualité exigée par le client de mieux en mieux informé, la réduction de la consommation en carburant, l’amélioration de la sécurité routière et le durcissement de certaines contraintes réglementaires, par exemple les normes de pollution.

La mutation technologique qui se prépare est à même de modeler profondément l’automobile de demain en permettant à l’homme de profiter pleinement de la liberté de se déplacer à sa guise.

La voiture plus sûre

Ces dernières années, l’industrie automobile a grandement contribué aux progrès réalisés dans le domaine de la sécurité routière. Mais des améliorations importantes peuvent être attendues des nouvelles infrastructures routières et du comportement des usagers.

Sur le plan européen et dans le cadre du projet Eurêka, treize constructeurs, des spécialistes de la sécurité routière, des équipementiers et plusieurs instituts de recherche ont décidé de lancer un grand programme: Prometheus. Son objectif est de rendre plus sûre et plus efficace la circulation routière et d’adapter ses exigences aux possibilités de l’être humain.

Dès à présent, il est possible d’envisager des percées technologiques dans les domaines de la micro-électronique et de l’informatique avec les techniques d’intelligence artificielle. La mobilisation des moyens au niveau européen constitue un atout considérable de réussite. Ces travaux étendront et compléteront ceux qui ont été entrepris dans le cadre des améliorations de la sécurité active et passive, en évitant la mise en situation accidentelle. On va même jusqu’à prévoir des dispositifs de vision électronique, relayant la fonction de l’œil dans les cas difficiles, comme la détection d’obstacles en cas de brouillard. La substitution d’un copilote électronique intelligent au conducteur défaillant pourrait également constituer une parade dans certaines situations dangereuses de circulation.

La sécurité peut également résulter de progrès réalisés dans le domaine des éléments mécaniques.

L’évolution de la mécanique automobile est incertaine, car elle hésite entre deux démarches contradictoires: la première se traduit par des simplifications destinées à réduire le plus possible les coûts de fabrication (essieux arrière simplifiés comme ceux de la Panda) sans trop détériorer les conditions de confort; la seconde conduit à une amélioration pour les prochaines années du confort et des capacités routières des véhicules futurs, au prix d’une complexité croissante des organes.

Ce mouvement amorcé par la mise sur le marché de véhicules à adhérence totale (4 憐 4) sur presque toutes les gammes pourrait se poursuivre si des recherches effectuées sur des programmes tels que les quatre roues directrices aboutissent à des résultats convaincants. Les lois de braquage des roues arrière peuvent être pilotées mécaniquement ou au moyen de l’électronique en fournissant ainsi une variété plus grande de possibilités dans le choix des logiques de commandes de l’essieu arrière.

Les recherches sur les suspensions actives peuvent également déboucher sur la mise au point de dispositifs qui annuleraient l’angle de roulis en virage et amélioreraient le confort en agissant automatiquement sur l’amortissement et la raideur de suspension en fonction de l’état du revêtement de la route et de la vitesse du véhicule. Les ressorts de suspension en matériaux composites ou pneumatiques pourront prendre le relais des éléments métalliques qui sont utilisés presque exclusivement aujourd’hui.

L’évolution du pilotage d’organes de sécurité comme les freins devrait se poursuivre par l’apparition, sur des véhicules de bas de gamme, de systèmes antibloqueurs simplifiés.

Le développement des boîtes automatiques et des systèmes de transmission à variation continue, qui s’est actuellement ralenti, pourrait être réactivé par l’introduction de l’électronique dans les systèmes de commande pour les boîtes de vitesses automatiques et l’aboutissement des recherches sur les courroies pour les variateurs.

Enfin, le rôle du pneumatique dans la conception des véhicules apparaît aujourd’hui fondamental. On pourrait assister à la création de pneumatiques adaptés à une voiture donnée, ce qui conduirait au couple pneu-voiture indissociable.

Une voiture plus sophistiquée et mieux équipée

Avec la baisse des contraintes liées aux chocs pétroliers, la puissance installée dans les véhicules d’une gamme donnée a augmenté. La puissance massique (kW/t) est donc en forte croissance sous l’impulsion des goûts de la clientèle. Il y a tout lieu de croire que cette évolution se poursuivra. Même dans le bas de gamme, la tendance à la sophistication s’affirme. Le programme Prometheus prévoit la mise en place d’ordinateur de bord comportant une fonction de navigation et permettant au conducteur de connaître sa position exacte, et le meilleur itinéraire, de prendre des décisions en fonction des bouchons en cours de formation.

La grande révolution à venir devrait être celle de l’électronique. Le pilotage de nombreuses fonctions pourrait lui être confié, comme les relations entre le conducteur et sa voiture, le traitement de l’ensemble des alarmes, les systèmes de prévention des pannes et leur détection, les systèmes de navigation, la gestion de tous les systèmes de sécurité.

Le nombre de dispositifs électroniques installés dans un véhicule automobile pourraît être, à l’horizon de l’an 2000, de l’ordre de deux ou trois fois celui qu’on trouvait sur un véhicule du début des années 1980. Les obstacles au développement de l’électronique ne tiennent qu’à des problèmes de coût et de fiabilité.

Cette révolution passera sans doute inaperçue lorsqu’elle sera impliquée dans des secteurs comme le réseau de distribution d’énergie électrique. La croissance du nombre de liaisons électriques sur les véhicules haut de gamme, par exemple, conduit à des situations sans issue dans la technologie actuelle qui ne pourront être débloquées que par un saut technologique. Certains véhicules de gamme moyenne possèdent actuellement dans leur planche de bord des faisceaux de 300 fils conducteurs (plus de 1 km). Dans l’avenir, cela entraînera une évolution vers des techniques d’alimentation en énergie du type multiplexé. Des variantes utilisant un mixage entre l’optique et l’électronique pourront également être développées, car elles minimisent les risques de dysfonctionnement dus aux perturbations électro-magnétiques.

Une voiture plus puissante mais plus propre

Les normes d’émission de gaz d’échappement des voitures à essence et diesel ont subi une révision tendant à harmoniser la politique de lutte contre la pollution.

Pour les véhicules de plus de 2 litres de cylindrée, le niveau fixé entraîne la mise en service de catalyseur trifonctionnel analogue à ce qui est en usage aux États-Unis. Pour les véhicules de cylindrée inférieure, et surtout de moins de 1,4 l, les niveaux fixés doivent permettre d’éviter le catalyseur trifonctionnel. Les constructeurs travaillent sur des systèmes de combustion en mélange pauvre, qui pourraient réduire la consommation tout en atteignant les niveaux fixés par l’utilisation d’un simple catalyseur d’oxydation.

Le remplacement du carburateur par le système d’injection (monopoint ou multipoint) semble un passage obligé pour respecter ces nouvelles normes.

Une voiture différente

L’évolution future des éléments de structure et de carrosserie sera probablement très marquée. Les contraintes imposées par l’adoption de formes aérodynamiques ont déjà conduit les constructeurs à faire évoluer la robe de la voiture et, par là même, la structure «travaillante» du véhicule (suppression des jets d’eau, portes autoclaves, feux avant et phares intégrés dans la forme).

Les programmes généraux de recherche poursuivis dans le domaine des matériaux de synthèse destinés à l’automobile (programme Carmat-P.S.A. dans le cadre d’Eurêka) ainsi que dans celui du montage automatique induiront de nombreuses évolutions en ce qui concerne la structure et le découpage de la robe.

Les progrès réalisés dans l’allégement des véhicules automobiles sont essentiellement dus au développement des méthodes de calcul de structure, qui ont atteint des degrés de validité très satisfaisants et ont permis d’optimiser le choix du type de matériaux et les dimensions de la structure. L’évolution dans cette direction devrait cependant être ralentie par la sévérité de certaines normes de sécurité secondaire (chocs latéraux, renversement) et par le souci d’améliorer davantage le confort de roulage (bruits et vibrations).

L’introduction de matériaux de synthèse peut permettre, à moyen terme, de réaliser des gains de poids, mais également de concevoir des formes de carrosserie différentes, répondant mieux aux demandes des stylistes et des aérodynamiciens. Toutefois, l’introduction massive de ces matériaux ne peut être envisagée qu’à terme beaucoup plus long, car elle implique, en ce qui concerne les procédés de fabrication, une remise en cause des gammes et des processus actuellement en place dans les usines. Par contre, il paraît possible d’accroître le pourcentage de pièces en matériaux de synthèse en étendant l’utilisation de ces matériaux aux pavillons et aux ailes avant, ainsi qu’à différentes petites pièces d’habillage. Les avantages qui en résultent (anticorrosion, indifférence aux petits chocs) seront favorablement accueillis par les clients.

La forme extérieure de la carrosserie apparaîtra de plus en plus comme un compromis entre le style et l’aérodynamique.

La voiture aérodynamique

Une décroissance rapide de la résistance à l’avancement d’origine aérodynamique est apparue à la suite des efforts entrepris pour réaliser des économies d’énergie.

L’objectif actuel pour la traînée aérodynamique (Cx ) se situe au voisinage de 0,30, d’un peu plus pour les petites voitures et de 0,28 à 0,29 pour les véhicules de haut de gamme. Il n’est pas impossible de parvenir à des valeurs de 0,25 à 0,26 au début des années 2000.

Les efforts des spécialistes ont porté sur la maîtrise de l’aérodynamique locale en optimisant ponctuellement les formes de manière à réduire le Cx de façon notable sans modifier trop sensiblement l’ensemble de la forme. C’est ainsi que les véhicules de haut de gamme ont conservé l’allure traditionnelle des 3 corps. Des galbes plus marqués, la surélévation des portes de coffres (favorable pour le volume des coffres à bagages) et l’affleurement des vitrages sont les traits les plus visibles des actions menées au cours des années quatre-vingt. Pour l’avenir, il semble que la prise en compte de l’écoulement sous le véhicule et de son guidage, de l’aménagement des écoulements internes, de l’intégration mieux assurée des différents équipements (antennes radio, essuie-vitres, rétroviseurs, phares) apportera une contribution importante à la réduction des traînées aérodynamiques.

Pour les véhicules courts de bas de gamme, la forme bicorps pourrait évoluer vers une réduction de la discontinuité entre le pare-brise et le capot, discontinuité qui défavorise la résistance aérodynamique.

L’abaissement de cette dernière et les possibilités de vitesses maximales importantes ainsi induites ont mis en évidence certains problèmes de stabilité qui apparaissent sur les formes de grande finesse aérodynamique. Des volets arrière, sur les véhicules rapides, devraient permettre de conserver des appuis suffisants sur les essieux afin de maintenir un comportement routier satisfaisant, même en atmosphère perturbée par le vent.

Il est également possible de prévoir l’apparition de systèmes escamotables qui auraient pour objectifs, à partir d’une certaine vitesse de circulation, de réduire la traînée et d’assurer une stabilité statique longitudinale de route (autocorrection aérodynamique sur une rafale de vent latéral, par exemple). La commande de tels dispositifs peut être obtenue par des moyens électroniques ou par la pression dynamique liée à la vitesse du véhicule.

C’est surtout par une meilleure connaissance des caractéristiques aérodynamiques au stade du projet que les résultats des recherches menées actuellement peuvent entraîner une modification dans la conception.

L’utilisation par les constructeurs de moyens informatiques très performants adaptés aux calculs scientifiques (Cray XMP 14 par exemple) constitue une incitation au développement d’un modèle de calcul aérodynamique d’écoulement autour du véhicule automobile. Plusieurs méthodes (éléments finis, différences finies) font actuellement l’objet de recherches. Elles sont fondées sur la résolution des équations de Navier-Stokes dans le domaine entourant la voiture, associées à des modèles de turbulence et de couches limites plus ou moins complexes.

Avant l’an 2 000, il est probable que ces méthodes déboucheront sur des outils de travail qui, mis à la disposition des créateurs, permettront, très tôt au cours de l’étude, de faire un choix de forme, en ayant la certitude de respecter le cahier des charges aérodynamique. On pourra envisager à terme de «faire rouler» un modèle prototype bien avant qu’il ne soit physiquement présent sur les pistes d’essais. Cette approche devrait marquer une rupture significative dans la méthodologie de conception.

Un développement scientifique européen pour la voiture de demain

Face à leurs concurrents américains et japonais, les principaux constructeurs européens ont senti le besoin de regrouper leurs forces afin de préserver et de développer les positions acquises sur les plans scientifique et technologique.

Des organismes comme le Joint Research Committee (J.R.C.) regroupent des constructeurs européens, y compris ceux qui n’appartiennent pas à la C.E.E., Volvo par exemple. Ils ont pour mission de lancer des programmes à vocation scientifique sur des sujets fondamentaux. Ils en partagent le coût et les fruits dans des domaines qui couvrent toutes les activités de l’industrie automobile.

La concertation et le développement de normes et de réglementation communes sont, depuis longtemps déjà, assurés par le comité des constructeurs du Marché commun (C.C.M.C.) qui harmonise la politique des différents constructeurs. Ces efforts sont aidés financièrement et soutenus par la Communauté européenne qui favorise ces travaux de recherche à l’intérieur de projets comme Eurêka, Brite, Esprit, Drive.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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